Entendu par un juge portugais vendredi en fin de journée, Abdoul Diallo, 25 ans, visé par un mandat d'arrêt européen, ne s'est pas opposé pas à son transfert vers la France, selon la police portugaise.
"Si tout se passe normalement, dans 5-6 semaines il pourrait être en France", a estimé le procureur de Grenoble Eric Vaillant quelques heures avant cette annonce des autorités portugaises, lors d'une conférence de presse dans la ville iséroise.
"Plus de quarante enquêteurs" ont travaillé à la "traque" du suspect et l'affaire, "évidemment prioritaire", a mobilisé "un maximum de moyens humains et techniques", a souligné de son côté Damien Delaby, directeur zonal de la police judiciaire.
Ce dossier était "majeur" au regard de "sa sensibilité, de l'émoi qui a été causé en Isère et des faits de cette particulière gravité", a-t-il insisté.
Tôt dimanche 8 septembre, Lilian Dejean, un agent de propreté de 49 ans et père de famille, avait été atteint d'une balle au thorax, alors qu'il tentait de retenir un homme ayant causé un accident de la circulation, au volant d'une puissante voiture de location immatriculée en Pologne.
Des papiers d'identité au nom d'Abdoul Diallo, domicilié à Saint-Martin-d'Hères dans la banlieue de Grenoble, avaient été retrouvés dans la voiture abandonnée par son conducteur qui avait fui à pied. Lilian Dejean était décédé peu après à l'hôpital.
Cet homme, ayant déjà un lourd casier, a été interpellé jeudi vers 17H00 à Póvoa de Lanhoso, à 70 kilomètres au nord de Porto, a précisé Eric Vaillant lors de la conférence de presse, se félicitant de "l'excellente collaboration" déployée avec les autorités portugaises.
Agé de 25 ans, le suspect "a été incarcéré la première fois par le juge des enfants de Grenoble à l'âge de 15 ans. Il a 19 condamnations à son casier judiciaire, beaucoup pour des faits de violence mais également pour du trafic de stupéfiants. Au total il a été condamné à six ans de prison ferme au cours des dix dernières années", selon M. Vaillant.
Interrogés sur les techniques qui ont permis de localiser le suspect au Portugal où "il se croyait à l'abri sans doute", les policiers se sont montrés peu diserts, renvoyant au "secret de l'enquête".
Les investigations se poursuivent sur de possibles complices l'ayant aidé dans sa fuite.
- Soulagement -
La mort de Lilian Dejean avait suscité une immense émotion à Grenoble, dont les habitants lui avaient rendu de vibrants hommages dès le lendemain du meurtre, puis au cours d'une marche blanche. Il avait ensuite été inhumé en Guadeloupe.
Le drame avait eu d'autant plus d'écho qu'il était intervenu en pleine série noire pour la métropole de Grenoble, où se joue selon les autorités une "guerre des gangs" entre trafiquants de stupéfiants. Le parquet y a dénombré fin octobre une cinquantaine de tirs par arme à feu liés au trafic de drogue depuis début 2024, qui ont fait six morts.
L'annonce de l'arrestation du meurtrier présumé a apporté du "soulagement" à ses proches. "On attendait ça depuis des semaines pour pouvoir avancer dans notre deuil et entrevoir le procès", a confié l'un de ses frères, Jean-Marc Dejean, au quotidien régional Dauphiné Libéré.
Aujourd'hui, ses proches "sont soulagés, car ils ont une perspective d'obtenir des explications". selon leur avocat Romain Ruiz. Depuis le 8 septembre, ils ont "connu des moments de doute, d'abattement", a-t-il précisé à l'AFP. "Mais ils n'ont jamais imaginé qu'on ne l'arrête pas" et "n'ont jamais mis en cause le travail de la justice et de la police."
"On est bien contents qu'il ait été interpellé", salue de son côté leur amie Louisa Ben Fakir. "On avait eu vent qu'il avait quitté la France depuis le départ. On savait qu'on était sur une bonne piste".
Le maire écologiste de Grenoble, Eric Piolle, a lui aussi salué la nouvelle de l'arrestation sur le réseau social X. "J'ai aujourd'hui une pensée pour la famille de Lilian, que j'ai rencontrée à plusieurs reprises: justice pourra leur être rendue", a-t-il écrit.