« Quand le bâtiment va, tout va. » Las, depuis deux ans, rien ne va plus dans ce secteur. En raison de sa sensibilité aux conditions de crédit, celui-ci a été le premier à être frappé par la hausse brutale des taux d'intérêt décidée par la BCE pour juguler une inflation galopante.

Dans une note publiée ce mercredi, l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) livre une photo de la crise en quelques chiffres. En 2023, 355.000 logements ont été autorisés et seuls 280.000 ont été mis en chantier ce qui représente des chutes respectives de 19 % et 25 %. « Depuis que l'on recense les mises en chantier, ces chiffres n'avaient jamais été aussi bas », souligne-t-il.

Le second oeuvre touché

L'investissement des ménages, qui recouvre les achats de logements neufs, les rénovations et les frais d'acquisition, s'est quant à lui replié de 1 % en 2022 et de plus de 5 % en 2023, et selon l'OFCE, il devrait encore se contracter de plus de 4 % cette année. Du côté des entreprises, la situation n'est guère meilleure : l'investissement en construction a régressé l'an dernier de 3,7 %.

Les enquêtes de la Banque de France montrent néanmoins une évolution différenciée entre le gros oeuvre, où l'activité se dégrade fortement, et le second oeuvre, qui se maintient grâce aux travaux de rénovation. Mais sur ce marché, le début d'année est « assez chaotique », a prévenu le mois dernier la Fédération française du bâtiment (FFB) qui met en avant les allers-retours du gouvernement sur les travaux éligibles à MaPrimeRénov'.

Au final, le tableau n'est guère reluisant : la production de la construction a reculé de 2 % en 2023. Et les perspectives d'activité restent sombres : elle devrait encore diminuer de 0,6 % au premier trimestre 2024 puis de 0,2 % au suivant, selon les prévisions de l'Insee.

Bond des défaillances

L'impact sur la croissance n'est pas anodin. La construction représente en effet près de 6 % du PIB et c'est une activité qui irradie de nombreux pans de l'économie. L'Insee indique ainsi que la baisse de l'investissement des ménages a coûté 0,3 point de croissance en 2023. « Au cours des deux dernières années, elle a amputé le PIB de 0,5 point », ajoute Mathieu Plane à l'OFCE qui estime qu'elle pourrait encore avoir un impact de 0,22 point cette année. Les taux d'intérêt continuent il est vrai de faire sentir leurs effets. « Dans le bâtiment, les promoteurs immobiliers restent très pessimistes », constatait l'Institut de la statistique dans sa note de conjoncture de mi-mars.

Ces difficultés se retrouvent dans les défaillances d'entreprises. En 2023, le nombre de sociétés entrées en procédure a bondi de 40 % dans l'immobilier et de près de 21 % dans la construction, selon les données de la Banque de France. En ce début d'année, la sinistralité reste élevée avec des hausses respectives de 44 % et 34 %. Le secteur attend désormais son salut des baisses des taux d'intérêt de la Banque centrale européenne (BCE) qui pourraient intervenir à partir du mois de juin.