Petit sursaut d'inflation en fin d'année. En décembre, la hausse des prix en France a légèrement accéléré à 3,7 % sur un an, après 3,5 % en novembre, selon l'estimation provisoire de l'Insee publiée jeudi matin. Mesurée par l'indice harmonisé européen IPCH, elle a atteint 4,1 % le mois dernier, contre 3,9 % un mois plus tôt.

Cette remontée en fin d'année était attendue par l'Institut de la statistique. Elle s'explique par l'accélération des prix de l'énergie et des services : les premiers ont affiché une hausse de 5,6 % sur un an, contre 3,1 % en novembre, tandis que les seconds ont grimpé de 3,1 % (après 2,8 %). En revanche, l'inflation sur les produits alimentaires a ralenti à 7,1 % sur un an. Les prix des produits manufacturés se sont eux aussi calmés.

Un sursaut provisoire

Sur un mois, les prix n'ont augmenté que de 0,1 %. La bonne nouvelle est la stabilisation des étiquettes dans les rayons alimentaires, portée par le tassement des prix des produits transformés.Le chiffre de décembre clôt une année 2023 mouvementée sur le front des prix. Il y a un an, l'inflation flirtait encore avec les 6 %. Si l'Insee ne révise pas son estimation, elle devrait atteindre en moyenne 4,9 % sur l'ensemble de l'année écoulée, contre 5,2 % en 2022, quand « le chiffre moyen de 1999 à 2020 était de 1,4 % », rappelle sur son blog l'économiste d'Ostrum Asset Management, Philippe Waechter.

Pour 2024, tous les économistes tablent sur une poursuite du ralentissement de l'inflation, même s'ils ne sont pas d'accord sur le tempo. L'Insee la voit ainsi à 2,6 %, sur un an en juin prochain, tandis que Patrick Artus, conseiller économique de Natixis, estime qu'elle devrait se situer autour de 3,4 % en moyenne annuelle en 2024. Les effets de la politique de resserrement monétaire menée par la Banque centrale européenne devraient continuer de porter leurs fruits en freinant la reprise économique.

L'inflation alimentaire devrait poursuivre son reflux - elle pourrait tomber à 1,9 % sur un an à fin juin, selon l'Insee - dans le sillage du recul des prix agricoles à la production (- 10 % sur un an). L'issue des discussions entre les entreprises agroalimentaires et la grande distribution sera toutefois déterminante. A la veille de Noël, l'Association nationale des industries alimentaires avait indiqué au « Monde » s'attendre à une hausse des prix alimentaires « comprise entre 2 et 3 % en 2024 ».La contribution de l'énergie à l'inflation devrait quant à elle rester « modeste », selon l'Institut de la statique. En février, le bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité devrait certes partiellement disparaître. Mais Bercy a promis que la facture bondirait au maximum de 10 % pour les particuliers.Sauf mauvaise surprise, l'inflation en 2024 devrait en principe être soutenue par les prix des services. Ceux-ci sont très dépendants des coûts salariaux. Or, beaucoup d'économistes s'attendent à ce que les salaires augmentent plus vite que la hausse des prix. Dans la foulée, le pouvoir d'achat des ménages progresserait. Mesuré par habitant, il augmenterait de 0,8 % cette année, selon la Banque de France. Ce qui permettrait à la consommation de retrouver des couleurs (+1,5 %, après +0,7 % en 2023) et de tirer la croissance française avec une contribution positive au PIB de 0,8 point.

Flambée des tarifs du fret maritime

De nombreux aléas entourent néanmoins ces prévisions. Conflit au Proche-Orient, troubles en mer Rouge, escalade entre la Russie et l'Ukraine : les tensions géopolitiques accroissent à nouveau les incertitudes sur l'évolution des prix du baril de pétrole et du gaz. Les attaques contre des navires commerciaux annoncent déjà, pour les prochains mois, une nouvelle flambée des tarifs du transport maritime - ce qui risque dans un premier temps de freiner la baisse des prix de production -, entraînant notamment un allongement des délais de livraison.

En tout état de cause, l'inflation ne disparaîtra pas en 2024. En d'autres termes, à quelques exceptions près, les prix vont continuer d'augmenter. « Un retour à la faible hausse des prix connue dans les années 2010 semble peu probable pour des raisons structurelles », souligne le directeur général de Rexecode, Denis Ferrand, sans sa lettre mensuelle.Coût de la transition écologique, volonté de renouer avec une souveraineté industrielle, faible productivité française : les raisons ne manquent pas en effet.