En 2023, le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, s'est accroché à son objectif de 1 % de croissance, malgré les pronostics bien plus pessimistes des économistes. L'exercice s'est finalement achevé sur une hausse de 0,9 % du PIB, selon l'Insee. Le même scénario semble se répéter.

Alors que l'exécutif vient deramener sa prévision de croissance pour 2024 de 1,4 % à 1 %, les experts jugent qu'il reste encore trop optimiste. Le consensus des économistes mise, lui, plutôt sur une progression de 0,7 % de l'activité économique cette année.

Pas d'accélération rapide

L'objectif de 1 % est « crédible et solide », a insisté Bruno Le Maire lundi, faisant valoir qu'« au moins sur le passé, c'est le gouvernement qui a eu raison ». La révision a d'ailleurs été avalisée par le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau. Dans un post sur LinkedIn, ce dernier l'a jugée « réaliste ». Dans ses projections de décembre, l'institution monétaire avance un chiffre proche, prévoyant une augmentation de 0,9 % du PIB en 2024.Pour le moment, les indicateurs apportent néanmoins de l'eau au moulin des observateurs les plus pessimistes. Avec un acquis de croissance de 0,1 % en début d'année, ces derniers doutent que l'économie française puisse faire mieux que l'année passée. « L'exercice 2023 avait démarré avec un acquis de croissance de 0,4 % », rappelle dans un billet de blog Philippe Waechter, d'Ostrum Asset Management. Selon ses calculs, pour réaliser l'objectif de 1 % cette année, « il faudrait un taux de croissance moyen de 0,35 % chaque trimestre ».

L'investissement ralentit

Or la conjoncture récente suggère que le rythme de croissance ne sera pas aussi élevé en début d'année. Selon Bruno Cavalier, chef économiste d'Oddo BHF, « les effets restrictifs de la politique monétaire sur l'économie réelle vont jouer à plein en 2024 ». Dans ce contexte, « il y a peu d'espoir d'une accélération rapide de l'activité », confirme Charles-Henri Colombier, directeur de la conjoncture chez Rexecode.La demande extérieure est affaiblie par le ralentissement économique dans la zone euro et par un choc de prix négatif hors zone euro. Sensible aux taux d'intérêt, l'investissement résidentiel souffre. Et l'investissement des entreprises, qui a été l'un des moteurs de la croissance en 2023, commence lui aussi à se tasser, sans s'effondrer. Enfin, la reprise de la consommation, attendue par de nombreux économistes, reste encore à confirmer.

Espoir d'un redémarrage

Si la Banque de France juge que « la désinflation en cours va favoriser le pouvoir d'achat des Français et soutenir la demande intérieure », l'expert de Rexecode est, lui, plus prudent : « La hausse des salaires réels laisse certes espérer un redémarrage, dit-il. Mais celui-ci risque de se heurter à deux freins : la dégradation du marché du travail et la volonté des ménages de maintenir un niveau élevé d'épargne. »

L'Insee table sur une progression du PIB de 0,2 % au premier comme au deuxième trimestre. Si ces projections se matérialisent, réaliser 1 % de croissance en 2024 nécessitera une croissance du PIB de 0,7 % au troisième et au quatrième trimestre, selon Philippe Waechter. Un niveau loin d'être assuré, ce d'autant que « le plan d'économies de 10 milliards d'euros annoncé par le gouvernement aura nécessairement un effet récessif à court terme », alerte Charles-Henri Colombier. « S'il n'y a pas d'événements géopolitiques majeurs sur l'année 2024, on peut anticiper une baisse des taux d'intérêt, la poursuite de la baisse de l'inflation, et donc une reprise de la consommation et des investissements des entreprises dans la dernière partie de l'année », veut croire Bruno Le Maire.