En dépit de l'inflation, les Français ont continué à soutenir financièrement les associations et fondations, souligne la 5e édition du baromètre de la solidarité réalisé par Ipsos pour la fondation Apprentis d'Auteuil. « Pour 6 Français sur 10, la dégradation du pouvoir d'achat est jugée forte ces deux dernières années. Pour autant, la part des donateurs a augmenté en 2023 », explique ainsi Etienne Mercier, directeur du pôle Opinion et Santé chez Ipsos. En effet, 51 % des Français déclarent avoir réalisé au moins un don l'an dernier, soit 1 point de plus qu'en 2022.Pour ce baromètre, l'institut de sondage interroge 1.000 personnes majeures représentatives de la population française. Afin de mesurer spécifiquement le comportement des ménages très aisés, s'y ajoutent 500 personnes issues d'un foyer aux revenus annuels nets dépassant 120.000 euros. En 2023, ces riches donateurs, qui représentent environ 2 % des foyers fiscaux, ont atteint un niveau record. 81 % d'entre eux ont déclaré avoir réalisé au moins un don, soit la plus forte proportion depuis la création de ce baromètre en 2019.

Malgré l'inflation

« Malgré l'inflation, la perte de donateurs entre 2022 et 2023 a été très faible. Seulement 2 % ont arrêté de donner. C'est encore plus vrai pour les hauts revenus, seulement 1 % d'entre eux déclarent ne pas avoir donné en 2023 alors qu'ils l'avaient fait en 2022 », commente Etienne Mercier. Sur le terrain, Stéphane Dauge, directeur de la communication et de la levée de fonds pour Apprentis d'Auteuil, constate ce maintien des contributeurs tout en le nuançant. « En 2023, la fondation a perdu peu de donateurs conséquents. En revanche, l'inflation a dégradé la capacité des dona teurs plus modestes à exprimer leur générosité. Ils continuent à soutenir nos actions, mais certains n'ont pas pu réitérer leur contribution », indique Stéphane Dauge.

Outre leur proportion record, la somme moyenne donnée par les très riches aux organismes caritatifs a également atteint un plus haut depuis l'existence du baromètre. En 2023, ils déclarent avoir versé en moyenne 2.686 euros, contre 2.372 euros en 2022. « Ce don moyen annuel dépasse de plus 9 % l'élan de générosité manifesté à la suite de la crise sanitaire et aux premiers confinements », observe Stéphane Dauge. En effet, en 2020, les personnes appartenant aux 2 % des foyers les plus aisés avaient donné en moyenne 2.463 euros aux associations et fondations.

« Même si nous avons l'habitude de dire que chaque don compte, qu'il soit de 5 ou de 1.000 euros, les donateurs aux hauts revenus sont essentiels. Leur participation accrue l'an passé m'amène à penser qu'ils ont pris conscience de leur possibilité et de leur responsabilité de venir en aide aux plus démunis », explique le porte-parole de la fondation Apprentis d'Auteuil. Les avantages fiscaux associés aux legs et aux dons participent aussi à motiver les riches donateurs.

Illustration en 2018 : la transformation de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), à l'origine d'une division par 2,7 du nombre de ménages assujettis s'était traduite par une baisse du nombre de donateurs de 5 %. « A la fondation Apprentis d'Auteuil, nous avons rattrapé le niveau de collecte perdu en 2018. En revanche, le pic de dons du printemps, traditionnellement poussé par la déclaration des impôts, reste moindre depuis la fin de l'ISF », confie Stéphane Dauge.Selon les statistiques dévoilées en ce mois d'avril par l'administration fiscale, 33.400 foyers à l'IFI ont indiqué avoir effectué des dons à des organismes d'intérêt général en 2023, un nombre de donateurs en hausse de 6,6 % par rapport à 2022. Ils ont donné l'année passée pour un montant total de 208 millions d'euros, en hausse de 7,8 % sur un an, soit un don moyen de 6.200 euros par contribuable donateur redevable de l'IFI.